Portrait d'Albert Lecup

Albert Lecup est né le 5 mai 1891 à Bapaume. Il est le benjamin d’une fratrie de sept enfants. Élevé dans un milieu très modeste, Albert se fait remarquer car il est bon élève et débrouillard. C’est ainsi qu’à 13 ans, il commence à travailler chez un notaire. À l’aise avec les chiffres, il rejoint ensuite le service comptabilité de la Société Générale à Arras. A 20 ans, la banque le nomme chef-comptable à Béthune.

C’est à cette époque, alors qu’il travaille à la banque, qu’il commence à s’intéresser à la politique, et notamment aux idées socialistes. Les journées de travail sont longues (10h minimum), et son salaire insuffisant le pousse à faire le camelot (marchand ambulant qui propose de petits objets) le dimanche et les jours fériés. À 20 ans, il s’engage au parti socialiste.

Ses premières armes

En octobre 1912, il commence ses deux années de service militaire au 110ème RI à Dunkerque. Il y apprend qu’en tant que militant socialiste, il est inscrit au “Carnet B”, le principal instrument de surveillance sous la IIIème République.

En août 1914, alors qu’il n’a pas terminé son service militaire, la guerre débute. Il rejoint alors les champs de batailles, d’abord en Belgique, puis dans la Marne ou encore au village de Douaumont où il est blessé en février 1916. Après une période de convalescence, on le nomme instructeur. Puis il repart pour le champ de bataille au sein du 8ème RI.
En septembre 1917, il profite d’une permission pour épouser sa fiancée, Valentine Célina Dertelle, institutrice, qui occupera une place importante dans sa vie et dans la quincaillerie.
Il est en Alsace lors de la signature de l’Armistice, puis participe à l’occupation de Wiesbaden en Allemagne.

Après sa démobilisation en août 1919, Albert décide de venir s’installer à Arras. La ville est en grande partie détruite, et il est impossible de trouver un logement disponible pour accueillir sa famille. En effet, Valentine a donné naissance au premier enfant du couple quelques mois plus tôt.

Son arrivée au 34-36 rue Abel Bergaigne à Arras

Avant la guerre, une des sœurs d’Albert était installée à Arras, au 36 rue Abel Bergaigne. Il décide alors de contacter la propriétaire du bâtiment, détruit pendant la guerre. Celle-ci souhaite vendre, non seulement le n°36, mais aussi le n°34, également en ruines.
Grâce à un ami qui lui consent un prêt, Albert achète les deux bâtiments détruits afin d’aménager dans le jardin, un habitat provisoire pour sa famille.

À l’aide de bons d’achat de matériels, il fait notamment l’acquisition de remorques américaines et de demi-lunes (structures en tôle servant de bâtiment provisoire). Une demi-lune est installée dans le jardin pour loger le couple et leur fils Claude, ainsi que la mère de Valentine. Il revend le reste du matériel, prend goût à ce travail et décide alors de s’installer dans le commerce de matériel d’occasion.

Le lancement de la quincaillerie

De retour à Arras, Valentine enseigne d’abord à Beaurains puis on lui propose un poste et un logement de fonction à la cité des Cheminots (actuel quartier petit Bapaume) à Achicourt. La famille déménage et la maison de demi-lune est désormais libre. Celle-ci sert donc à Albert de bureau et de magasin pendant la reconstruction des bâtiments aux 34 et 36 de la rue Abel Bergaigne.
Son deuxième fils, Paul, naît le 8 juillet 1923 à Achicourt. Les années qui suivent, Albert se concentre essentiellement au développement de son entreprise.

Un personnage engagé

Lorsque la Deuxième Guerre mondiale éclate, il est mobilisé. Il a 48 ans et reçoit une affectation spéciale pour la récupération de l’acier. A la fin du mois de juillet 1940 après la débâcle des français face aux allemands, Albert est de retour à Arras. Comme de nombreux arrageois, il va vivre quatre longues années sous le régime d’occupation, jusqu’à la Libération de la ville, le 1er septembre 1944.

Après la guerre, Albert Lecup s’engage en politique. Lors des élections municipales de 1945, il est élu conseiller municipal sur une liste radicale socialiste (parti intermédiaire entre la gauche et la droite). Opposant de Guy Mollet, il reste au conseil municipal pendant près de 15 ans. En 1959, alors qu’il approche des 70 ans, il décide de ne pas se représenter.

Quelques années plus tard, Albert décide de prendre la plume et de raconter ses souvenirs. Il publie trois livres entre 1974 et 1979 et se présente alors comme écrivain-ferrailleur.

1944. Installation du Conseil Municipal d'Arras d'après guerre avec à gauche (3e personne) Albert Lecup. Merci à Jean-Claude Leclercq pour la photo

À Arras, beaucoup connaissent donc Albert Lecup et sa quincaillerie, on le connaît aussi en tant que conseiller municipal mais c’est également à travers son investissement dans la vie locale qu’il est considéré comme une figure arrageoise.
Il est président du club des jouteurs, membres de la société littéraire des Rosati, membre de la Chambre de Commerce d’Arras ou encore un des administrateurs de l’Orphelinat du Père Halluin.

On le connaît et on le reconnaît en ville, portant la barbe et pipe à la bouche, Albert Lecup est un personnage qui a marqué de son empreinte la vie de notre cité arrageoise. Il meurt le 10 janvier 1990 à Arras, à l’âge de 99 ans.